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Semaine de 4 jours et congés illimités : viable ?

 

  • D’après un sondage de Robert Half en 2022, la moitié des entreprises françaises pensent se mettre à la semaine des 4 jours. Parmi eux, 22 % qui la pratiquent déjà et 35 % qui envisagent de s’y mettre.*
  • Parallèlement, 84 % des salariés français sont favorables à cette pratique, d’après une étude Citrics.  71 % d’entre eux le seraient, uniquement s’ils ont le même salaire. Dans le cas contraire, ils verraient cela comme du travail à temps partiel.
  • D’un autre côté, une étude réalisée par Jobfit en 2018 montre une hausse de 60 % de l’offre de congés illimités en France hexagonale.

*Enquête menée en ligne en juin 2022 auprès de 300 dirigeants français, notamment des directeurs généraux, des directeurs administratifs et financiers ainsi que des directeurs des systèmes d’information, ayant des fonctions liées au recrutement. Les participants représentaient des entreprises de diverses tailles, opérant dans les secteurs privé et public.

Tous ces chiffres démontrent un changement majeur dans la façon de travailler, aménageant davantage de temps libre pour les salariés. En effet, le travail intensif a démontré ses limites : grande démission, démission silencieuse, hausse du burn-out, phénomène de démotivation en témoignent. Le phénomène de « détravail », développé par la philosophe Céline Marty, a pris le relais : « travailler moins, pour vivre mieux ». Il se manifeste aujourd’hui par une semaine de travail de 4 jours au lieu de 5, ainsi que la possibilité de prendre des congés au-delà des droits légaux.

Toutefois, ce schéma est-il réellement avantageux pour tous, autant pour les salariés que pour les entreprises ? Sur le long-terme, est-ce viable ? Nous en parlons en détail dans cet article.

 

Le détravail : un phénomène qui prend de l’ampleur

Détaillons tout d’abord le concept de « détravail ».  Il ne s’agit pas d’un phénomène tout à fait nouveau. Il est déjà apparu durant les grèves de 1968, avec un slogan fort : « Ne pas perdre sa vie à la gagner. ». Toutefois, le mouvement a été absorbé par la mondialisation et le gain de puissance de la société de consommation.

A l’heure actuelle où la mondialisation et la surconsommation s'essoufflent, le détravail renaît de ces cendres. Les gens veulent se cantonner à l’essentiel dans la consommation, à une consommation éco-responsable. Ils veulent, en plus, avoir du temps pour vivre, en travaillant moins, mais mieux. L’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle constitue un critère essentiel pour le choix d’un emploi, en particulier auprès de la jeune génération. Il en résulte une nécessité de production amoindrie, un revenu qui n’a pas besoin d’être très élevé et un temps de travail inférieur aux 40 h hebdomadaires, inférieur aux 5 jours sur 7.

Le détravail consiste donc à être efficace durant un temps court consacré au travail. Il se libère des contraintes horaires et se jauge uniquement aux résultats. D’ailleurs, la généralisation du télétravail a contribué à l’expansion du détravail. Dans un télétravail, personne ne sait à quelle heure un salarié travaille. Tout ce qui compte, c’est que le travail soit fait.

Pratiquement, le détravail peut aussi prendre la forme de la semaine de 4 jours, des congés illimités, ou de la flexibilité totale du choix des heures ouvrées.

Semaine de 4 jours et congés illimités dans la pratique

Voyons ensuite quelques exemples de mise en pratique du détravail, notamment à travers la semaine réduite de travail et des congés prolongeables à souhait.

- Une journée off, un jour de la semaine, pour tous : voici une forme courante de la semaine de 4 jours. L’entreprise n’ouvre pas ses portes pour un jour, en plus du week-end, le plus souvent, le vendredi.

- Une organisation en binôme ou en alternance : soit, l’employé a un binôme qui peut faire toutes les tâches qui lui incombe, soit, les membres de l’équipe sont fongibles et interchangeables. Dans ce cas, un jour par semaine ou pour la durée d’un congé, un binôme ou une personne de remplacement doit être présente au bureau pour assurer le travail pendant que l’autre est absent, à tour de rôle.

- La compensation avec la durée de RTT (réduction du temps de travail pour ceux qui font plus de 35 h par semaine), qui permet : soit, de renoncer au RTT pour bénéficier de la semaine de 4 jours, soit, de moduler l’usage du RTT pour juguler parallèlement les jours pleinement travaillé.

- L’aménagement annuel des heures ouvrées, impliquant des congés ou des jours travaillés moindres à certaines périodes de l’année et un temps maximal de travail durant les périodes de pic ou de rush (exemple : à noël, durant l’été pour certaines activités saisonnières).

- La flexibilité totale, qui implique de ne pas travailler ou de partir en congé lorsque la personne le veut, tant que le travail est accompli et que l’organisation de l’entreprise ne subit aucune perturbation. Ce système est proche du freelancing.

Avantage des semaines de 4 jours et des congés illimités

Accorder plus de temps libres aux salariés, est-ce une pratique qui fonctionne autant pour les entreprises que pour eux ? De nombreux témoignages et études viennent le confirmer.

En premier lieu, du côté de l’entreprise, ce genre de mesure engendre une constance de la productivité, une réduction du burn-out. Il s’agit aussi d’un argument de taille dans la gestion de l’image de marque employeur.

- Selon une étude des chercheurs de la Texas A&M University, aux États-Unis, relatée sur Science Daily, les employés sont moins productifs en fin de journée, en fin de semaine et plus généralement, lorsqu’ils n’ont pas eu suffisamment de pause

Il est donc préférable de tout miser sur les moments où ils sont vraiment productifs, en maximisant les bénéfices du temps de concentration et en leur octroyant plus de libertés, le reste du temps. 

La même étude démontre d’ailleurs que les entreprises réduisant le nombre de jours ouvrés n’ont pas souffert d’une baisse de productivité, leurs recettes ont même augmenté de 1 % symbolique. Ainsi, une semaine de 4 jours ou un congé illimité responsabilise les équipes, les obligeant en quelque sorte à atteindre un résultat défini pour pouvoir profiter d’un break mérité, stabilisant ainsi la productivité.

- Conséquemment, ce genre de pratique déteint sur la santé physique et mentale du travailleur. Il est en meilleure santé et est moins sujet au stress. Il fera aussi moins sujet aux arrêts maladies.

- Enfin, donner plus de temps libre aux salariés est un argument de taille dans la gestion des RH. Il s’agit d’un argument efficace dans l’attraction et la conversion des talents, l’équilibre vie privée et vie professionnelle étant un des principaux critères d’attractivité d’une marque employeur (étude Stepstone and Identifire). A fortiori, il maintient la motivation du salarié, favorise la rétention et la fidélisation de celui-ci et impacte sur le taux d’absentéisme imprévu. Certaines entreprises – comme le témoigne l’agence de création Digitale Mozoo, argument que ces libertés engendrent une diversification des profils qui postulent pour travailler au sein de l’entreprise, favorisant l’inclusion.

En second lieu, du côté des salariés, des congés illimités ou une semaine de 4 jours est, évidemment, avantageuse. Elle lui permet « d’avoir une vie » en dehors du travail, de s’épanouir personnellement parce qu’il aura plus de temps pour ses besoins privés, d’être motivé, heureux et bonne santé.

Inconvénients et limites de ce mode de travail

Pour autant, l’étude faite par Jobfit en 2018 révèle qu’il y a « 50 fois plus d’offres de congés illimités aux Etats-Unis qu’en France, deux fois plus en Allemagne et aux Pays-Bas ». Ce genre de pratique ne fait donc pas encore l’unanimité, et pour cause, des revers incontestables du fait d’accorder davantage de liberté aux salariés.

Un rythme de travail décuplé durant les jours ouvrés – parfois insoutenable

Voici le premier inconvénient majeur. En effet, pour que l’entreprise maintienne sa productivité, la réduction des heures de travail doit être compensée quelque part. Il s’agira, le plus souvent, d’heures de travail en plus rajoutés et répartis entre les jours ouvrés. Ces jours ouvrés intenses peuvent amener le burn-out, le stress et les arrêts-maladies, détruisant ce qui était perçu comme un avantage. L’employé sera stressé entre les obligations professionnelles dont il doit s’acquitter, afin de pouvoir bénéficier de temps libre, dont il a également besoin.

La baisse des interactions sociales

Les opposants de la semaine de 4 jours et des congés illimités estiment aussi que ce mode de travail n’est pas favorable à une socialisation et à de véritables interactions humaines sur le lieu de travail. En effet, pour que le système fonctionne, la part du temps de concentration et du temps de travail individuel de chacun doit être maximale. Ce qui laisse peu de temps à la collaboration, aux réunions et aux interactions. 

Les conséquences de cette situation sont diverses. Il peut y avoir, par exemple, désengagement des salariés, l’engagement humain et émotif étant considéré comme le plus haut niveau d’engagement. Il peut aussi y avoir baisse de performance – la performance étant souvent un résultat de la satisfaction au travail et la satisfaction au travail, découlant en partie d’une bonne et active relation de travail.

Une pratique qui ne s’adapte pas à toutes les structures 

D’après l’étude de Robert Half mentionnée ci-dessus, seules les entreprises high-techs, quelques PME et TPE se sont mises à pratiquer la semaine de 4 jours en France. Aucune grande multinationale ou industrie ne se démarque. En outre, selon l’étude de Jobfit en 2018, 50 % des congés illimités en France sont adressés aux développeurs informatiques. Dans les autres Etats, la pratique est plus générale et concerne aussi bien des commerciaux que des ingénieurs.

C’est dire en fait que ce système ne convient pas à tous les emplois, ni à toutes les structures, en particulier ceux qui requièrent un travail manuel. Dans certains cas, cette pratique force l’entreprise à recruter, ne serait-ce qu’un travailleur à temps partiel, pour « compenser » l’absence du salarié. Cela revient plus cher, pour un salarié qui peut ne pas avoir les mêmes compétences que le salarié à temps plein.

Un système susceptible d’abus

Enfin, autant de liberté exige un contrat moral entre l’employeur et l’employé, c’est-à-dire une pleine conscience des obligations et de la redevabilité vis-à-vis de l’entreprise et une prise de responsabilité continue. Il présente donc l’inconvénient d’être souvent abusé, en particulier les congés illimités. Le manager doit donc continuellement être à la quête de signaux de désengagement, car sans l’engagement maximal, la productivité en souffrira forcément.

 

Conclusion :

La semaine de 4 jours et les congés illimités présentent un intérêt majeur, en particulier pour attirer et fidéliser les talents. Toutefois, une entreprise doit regarder au-delà de l’aspect « marketing » sur son image de marque employeur et vérifier la pertinence d’un tel modèle au regard de l’organisation de l’entreprise. Sans les mesures d’accompagnement qui s'imposent, le système ne sera pas viable. Parmi ces mesures d’accompagnement, il y a notamment le recrutement d’un talent qui saura fonctionner conformément à l’esprit de ces heures de travail raccourcies : un talent productif, flexible, moralement engagé qui donnera son maximum durant son temps de travail. Les soft-skills seront alors au centre des critères de sélection. Confiez vos recrutements à des experts qui maîtrisent et ont de l’expérience dans les recrutements basés sur les soft-skills. Collaborez avec la plateforme de recrutement Hunteed. 

Jean-Ghislain de Sayve

ParJean-Ghislain de Sayve

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